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Récits d'un exilé pédagogique

3 mai 2008

Creep

Ma première expérience avec la mort remonte à mes 6 ans je crois.

C'est un souvenir assez flippant en soi, parcequ'il ne met en jeu aucun cadavre, aucun décès véritable, pas même la moindre petite image morbide dans un film, un livre, juste la prise de conscience de l'existence du vide, et cette image, complètement anxiogène, est venue avec un album de Tintin™. On a marché sur la lune, pour être précis.
Je ne sais pas trop ce qui s'est passé dans ma tête à ce moment là, c'est un peu un des gros mystères de mon existence mais j'étais peinard, assis dans la voiture de mes parents pendant que ces derniers profitaient d'un repas probablement agréable dans un restaurant, en train de dévorer pour la 4e fois au moins les aventures spaciales du blondinet à la houpette inflexible quand, tout à coup, une petite tirade du Capitaine Haddock, les yeux rivés vers la planète bleue déchaîne un véritable tourbillon dans mes neurones à l'état encore presqu'embryonnaire.


"Cette bonne vieille terre... la reverrons nous un jour ?"

Cette phrase, apparemment bénigne, me terrifia. Je n'ai fait ni une, ni deux, j'ai sauté hors de la voiture, comme pourchassé par l'ombre de la Mort, me réfugier dans les bras de ma mère, pleurant à chaude larmes. Je me souviens des rires des adultes, de la faible compassion d'autres à base de "oh le pauvre petit, regardez comment il est triste" et autres "Il devait trouver le temps long dans la voiture".
Et moi, l'esprit en vrac, incapable d'exprimer ce qui se passe, en train de déverser toutes les larmes de mon corps sur les genoux de ma mère, impuissante, inquiète et complètement déboussolée face à son gamin qui se met à pleurer "sans raison".

Alors, bien sûr, nous sommes sorti, nous avons inspecté la voiture, pour trouver une trace d'un quelconque méchant, mais il n'y avait bien sûr rien du tout. Ce qui me faisait tant pleurer, c'était quelque chose qui n'existait pas, c'était une idée, un concept, quelque chose que je ne pouvais pas fuir physiquement, quelque chose qui était dans ma tête.
J'ai tenté de faire comprendre à ma mère, qui, confuse, avait pris la Bande Dessinée à la recherche de cadavres, de fusillades, d'éxécutions, mais, ne trouvant que cette pauvre petite phrase, elle ne sut que dire de bien profitable. "Ca va aller, ça va passer ne t'inquiète pas, ils vont retourner sur terre, continue l'histoire tu vas voir, tu n'as aucune raison de t'inquiéter".

Et pourtant, elle ne se rendait pas compte d'à quel point j'avais toutes les raisons du monde de m'inquiéter. Je venais pour la première fois de me heurter à une indescriptible forme de la tristesse et à l'incompréhension qu'elle entraîne avec elle.

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3 mai 2008

J-27

J'ai toujours détesté les blogs, et voilà que je me retrouve à en créer un.

Allez comprendre. Peut-être qu'au fond de mon Moi sommeille un être passablement "in" qui suit de loin les modes et fluctuations de la coolitude et qui me fait réagir assez tardivement à ce genre de phénomène ou peut-être ais-je tout simplement envie de me passer d'une vrai thérapie, que je compte me faire une introspection en live, essayant de trouver des réponses à ces questions qui n'existent qu'avec moi, en masquant le tout derrière une volonté vaguement altruiste de "partager son expérience".

Ceci dit, maintenant que je suis là, seul, les deux pieds devant la porte, que je m'apprête à franchir le moment le plus important de mon existence, je peux faire un break d'une floppées de microsecondes, prendre une bonne bouffée, me retourner vers le passer et me demander "bordel, mais comment j'en suis arrivé là ?"

J'ai lu beaucoup de blogs d'étudiants en médecine, et j'ai eu envie d'en écrire un aussi parceque, moi, c'est pas pareil, je me suis dit au début et puis, parceque j'en ai besoin aussi, de me rappeler, de me remémorer tout celà. Le lycée, anarchique, destructeur; les études de lettres foireuses, baclées et l'arrivée en Belgique, à 23 ans, aussi vide qu'à 16. Alors me voici : Ca va être anarchique, ça va être bancal, parfois très sincère et d'autres totalement faux, mais ce sera ma mémoire, ou du moins, ce que mon esprit à bien voulu en faire.

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